LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA MODE

Effondrement du Rana Plaza
2013

Le 24 avril 2013, le RanaPlaza s’effondre au Bangladesh. 1115 ouvriers du prêt-à-porter meurent sous les décombres. Cet évènement marque l’histoire et indigne le monde entier. Certains le surnomme le «11 septembre de la mode». Soudainement, une partie des consommateurs prennent conscience de l’absurdité du système actuel et réagissent en créant le mouvement international «fashion révolution». Ce mouvement citoyen, avec son #whomademyclothes (numéro 1 des tendances twitter le 24 avril 2015), exige la transparence de l’industrie et invite les consommateurs à être plus soucieux des provenances et des conditions de production de leurs vêtements.
Également en réaction direct à cet événement, Li Edekoort, prévisionniste des modes et tendances du future, l’une des vingt-cinq personnes les plus influentes du monde de la mode selon le Times Magazine en 2008, a rédigé et publié en 2014 «manifeste anti-fashion» afin de dénoncer un système de la mode obsolète et d’inviter notamment les jeunes créateurs à repenser le vêtement en s’intéressant d’avantage aux tissus et à «la façon».

De manière générale, actuellement, l’industrie de la mode produit plus de 80 milliards de vêtements et accessoires, et 80% de ces vêtements achetés en occident finissent à la poubelle.
Entre l’utilisation de substances chimiques et/ou nocives pour la production et la fabrication des fibres, le gaspillage des ressources provoqué par la surconsommation de vêtements et la pollution générée par les kilomètres parcours d’un vêtement avant d’arriver en boutique, l’industrie de la mode est la deuxième industrie la plus polluante au monde derrière l’industrie pétrolière.
Par exemple, du champs à la boutique, un simple jeans peut parcourir jusqu’à 1,5 fois le tour de la terre et nécessite plus de 2 000L d’eau et l’emploie de pesticides. 2,5 Milliards de jeans sont vendus par an dans le monde. Globalement, l’industrie de la mode est responsable de 10% des émissions de carbonne, soit plus que l’ensemble des émissions provenant des vols internationaux et de la navigation maritime, et de 20% des eaux usées mondiales. Les principales marques du prêt à porter utilisent, à elles seules, environs 100 000 milliards de litre d’eau par an. Et la teinture des textiles est le deuxième pollueur d’eau dans le monde selon un rapport de la Fondation Ellen MacArthur.
De plus, à chaque lavage, les fibres synthétiques rejettent des microparticules de plastique trop fine pour être filtré par les centrale d’épuration. Ainsi, 500 000 tonnes de ces micro-particules de plastique sont évacué, chaque année, dans les cours d’eau, ce qui équivaut à 50 milliards de bouteilles plastiques.
Aujourd’hui, une personne achète 60% de vêtements de plus qu’il y a 15 ans, et garde chaque pièce deux fois moins longtemps, selon une étude de McKinsey. Autrement dit, on consomme et on gaspille deux fois plus qu’au début du siècle.Et, dans le monde seulement 1% des textiles sont recyclés ou revalorisés, tandis que le reste, qui équivaut environ à un camion poubelle par seconde, est enfouie ou incinairé.
En France, chaque année, 7000 tonnes de textile sont consommées, et seulement 1/4 est trié puis revalorisé.

Face à ce triste constat, des tendances émergentes aspirent à concevoir une mode qui pollue et gaspille moins.
La slow-fashion et la fashiontech, avec des moyens en apparences très éloignés, partagent cette même utopie.
D’un côté, la fashiontech, axe ses recherches sur le développement de fibres alternatives innovantes afin de remplacer les fibres synthétiques. Selon ce mouvement, le futur sera de concevoir des vêtements avec des fibres végétales sur-abondantes comme les algues, les pommes de terre, le maïs, etc. ou encore avec des fibres inspirées du biomimétisme, comme par exemple la soie artificiel d’araignée. Cette soie artificielle, a récemment été crée par la start-up californienne Bolt Threads, en reproduisant de la protéine d’araignée. Cette néo-matière est aussi souple et robuste que l’originale, et est même capable d’arrêter les balles.

En ce qui concerne le cuir et la problématique de la cause animale, la recherche tente également d’apporter des réponses avec la création de matières inovantes alternatives obtenus grâce à des fibres végétales d’ananas (pinatex), de raison (vegea), ou encore de champignon (muskin), communément appelé par abus de language “cuir vegan”.

D’un autre côté, les tendances comme la Slow-fashion et le Slow-craft  privilégient la qualité à la quantité. Elles aspirent à des produits durables et promeuvent le temps nécessaire des confections artisanales. Elles favorisent aussi généralement la production locale et les circuits courts afin d’écarter simplement la problématique de la pollution liée aux transports et suggèrent de diffuser les concepts, les technologies et les projets à la manière des logiciels libres, en informatique.
De là, naît une nouvelle forme de luxe : l’ultra slow-fashion.
Cette tendance annonce une ère post-luxe, où la clientèle aisée ne désire plus posséder un énième accessoire chic , mais cherche à s’offrir une pièce unique avec un supplément d’âme que l’on obtient qu’avec le plus précieux des biens : le temps.
Une tendance qui peut être illustrée, par exemple, par le collectif de tissage, de conception et de production «friends of light» créer par Pascale Gatzen.
Ce collectif réalise des pièces sur-mesure avec du tissus tissé manuellement à partir de fibres cultivées, transformées et filées localement. Leur modèle phare est un clin d’œil à la veste de tailleur Chanel, tissé à la main avec des techniques primitives. Cette veste demande à elle seul, plus de 160 heures de travail et coûte plus de 3200$.